Gautier en Egypte (3)

Mardi 19 Novembre 2019-00:00:00
' Ayman Elghandour

Gautier a repris la seconde partie de la représentation qui était plus intéressante, mettant l'accent sur les psylles. Il a profité de cette occasion pour remonter à la civilisation pharaonique qui s'intéressait généralement aux serpents et en particulier à "l'Urœus sacré qui figure si souvent sur les corniches des temples, les parois des pylones et le pschent des dieux et des pharaons."  L'auteur a découvert un spectacle étrange et a fidèlement tenté de le présenter à ses lecteurs. Il a compté à la fois sur la vue d'ensemble et sur la vue partielle pour présenter cette scène vaste et complexe. Il ne s'est pas contenté de nous faire voir le psylle et ses serpents, mais il a essayé de bien décrire les relations mutuelles entre les éléments de ce tableau global. Il a rétréci l'espace de l'observation de manière à pénétrer dans la scène décrite. Nous avons vu le psylle prendre de son sac un serpent et le poser sur la terre. Influencé par la chaleur du soleil, le serpent s'est mis à relever la tête et à faire sortir sa langue d'une manière horrible. Le jeune garçon l'a saisi, l'a enroulé autour de son cou et l'a laissé se glisser dans sa poitrine. Après l'avoir tiré, il l'a jeté sur les singes qui, "affolés de terreur, se mirent à tourner en rond, glapissant d'une façon lamentable, faisant des culbutes extravagantes, levant au ciel leurs petites mains noires comme pour protester contre la tyrannie de l'homme, s'arrachant le poil de la tête et se coupant presque le ventre pour briser leur chaîne." Gautier  a pu exprimer à la fois l'inhumanité du psylle, la souffrance des singes qui étaient enragés d'effroi et s'enroulaient follement. Cette scène a bien révélé la compétence de l'auteur dans le domaine de la description. Ce qu'affirme Constance Gosselin Schick, disant que "la description occupe une place voyante dans l'œuvre de Gautier." Ce dernier ne se borne pas à décrire des objets, mais il souligne les relations cachées que les autres ont du mal à saisir. Ceci paraît évidemment à travers la lutte entre le serpent et les singes où la description a pris une dimension narrative. Bien que l'action soit intensive et concentrée sur les bêtes, on a remarqué un début, une intrigue et une fin. Sortant d'un sac, le serpent reste immobile; réchauffé ensuite par le soleil, il commence à s'attaquer aux singes qui bougent sans cesse pour l'éviter; et enfin le spectacle s'achève lorsque le serpent rentre dans le sac jeté à terre.